Par Jacques Rivard, journaliste, spécialiste des questions environnementales et ancien professeur en journalisme à l’Université de Montréal
« La France va travailler avec le Canada pour qu’il soit à l’avant-garde en matière d’écologie : il faut un Canada A et non un Canada B en environnement ». Telle est l’essence du message qu’a livré le nouvel ambassadeur de France au Canada, Nicolas Chapuis, devant les centaines de délégués à la conférence Americana qui réunissait à Montréal cette semaine les représentants de l’industrie verte du monde.
Voir notre vidéo reportage par Guillaume Mazoyer et Jacques Rivard au bas de cet article.
Selon le nouvel ambassadeur, qui a déjà pu rencontrer le premier ministre Stephen Harper et rend visite aux dirigeants provinciaux dans sa tournée pan-canadienne, il est clair que le Canada sera présent à la conférence de Paris en décembre, mais à quel niveau d’ambition, voilà la question ? C’est d’ailleurs à cet aspect que s’affairera le gouvernement Français en tentant de convaincre Ottawa et les provinces de s’engager plus avant en matière de protection de l’environnement, et ce, même si Ottawa s’est déjà retiré de l’accord de Kyoto. Le gouvernement Harper s’est toutefois engagé il y a quatre ans à réduire ses émissions génératrices de gaz à effet de serre de 17 pour cent sous les niveaux de 2005 en 2020, cible qui sera largement dépassée reconnait Environnement Canada, à cause de la production de pétrole à partir des sables bitumineux de l’Alberta.
Pour la France, il est impensable que les pays du monde ne puissent en arriver à un accord pour contrôler les émissions responsables des changements climatiques, et ainsi éviter l’échec des pourparlers de Copenhague en 2009. L’ambassadeur Chapuis explique cet échec par l’incompréhension entre les pays riches qui refusaient de payer pour amener les pays moins bien nantis aux normes environnementales modernes, ces pays pauvres tenant responsables les pays développés des problèmes de pollution actuels. Mais le représentant de la France à Ottawa voit dans le récent accord Washington-Pékin pour la réduction des gaz à effets de serre le lien entre pays riches et pauvres qui manquait à Copenhague pour la conclusion d’un accord international. « Pas de Paris sans accord » est devenu le leitmotiv de l’ambassadeur Chapuis à l’aube de la rencontre de Paris en décembre prochain.
« Manque de volonté politique » du gouvernement canadien ?
D’autre part, à la même rencontre de l’industrie de l’environnement à Montréal, un rapport rédigé par 70 scientifiques, ingénieurs, économistes Canadiens conclut que le Canada serait en mesure de réduire de 80 pour cent ses émission de gaz à effet de serre dès 2035 s’il se tournait vers les énergies renouvelables en production d’électricité. Les principales propositions pour atteindre cet objectif sont une politique nationale qui met un prix sur les émissions de produits du carbone, tel le pétrole, l’arrêt de subventions à ce type d’énergie, et une génération d’électricité à partir de sources renouvelables, notamment de barrages hydrauliques dans plusieurs provinces.
Le rapport précise que déjà 77 pour cent de l’énergie est produite sans carbone au Canada. Selon le rapport, le plus important problème dans l’atteinte de ces objectifs n’est pas technique ou économique, mais bien un manque de volonté politique. Une des responsables du rapport, le Docteur Catherine Potvin, de l’Université McGill, explique en partie ce problème par le fait que les questions d’environnement et d’énergie sont de responsabilités partagées fédérale et provinciale. On apprend enfin dans le rapport que le gouvernement Harper est justement à consulter les provinces et territoires dans le but de fixer les cibles canadiennes de réduction de gaz à effet de serre pour la période suivant 2020, que viserait un accord international attendu à Paris en décembre prochain.
Reportage vidéo sur l’intervention de Nicolas Chapuis à la Conférence Americana le lundi 16 mars dernier
Crédit photo : Guillaume Mazoyer ]]>